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41 ‖ juin 2025

Amaèti SIMLIWA PITALA et Ibn Habib BAWA

Du Brown-out à la procrastination au travail : effet du Stress chez les enseignants des universités publiques du Togo

Article

Résumé

Dans la quête de l’effet du stress né d’une perte de sens au travail (Brown-out) sur la tendance de l’individu à remettre à lendemain ce qui peut être accompli immédiatement, l'objectif c’est de vérifier son influence sur une relation susceptible d’exister entre les variables d’étude. Grâce aux méthodes de corrélation et de régression facilitées par le logiciel SPSS 20.0, le traitement des données collectées à partir des échelles de stress de P. Tap et al. (2001), de procrastination de P. Steel (2007; 2010) et de Brown-out de T. E. Brown (2020), est rendu possible. L’analyse des résultats à l’issue du traitement de données révèle que le niveau du stress, est proportionnel du seuil d'affliction observée aux différentes formes de procrastination des enseignants. De cette étude, des perspectives portées sur le stress des enseignants et de sa gestion méritent d'être envisagées.

Abstract

In the quest to determine the effect of stress resulting from a loss of meaning at work (brown-out) on an individual's tendency to procrastinate what can be accomplished immediately, the objective is to verify its influence on a likely relationship between the study variables. Using correlation and regression methods facilitated by SPSS 20.0 software, the data collected from the stress scales of P. Tap et al. (2001), procrastination scales of P. Steel (2007; 2010), and Brown-out scales of T. E. Brown (2020) were processed. Analysis of the results after data processing reveals that the level of stress is proportional to the threshold of distress observed in different forms of teacher procrastination. This study offers insights into teacher stress and its management.

Texte intégral

pp. 225-243

01/06/2025

Introduction

1Le syndrome de stress ou plus simplement le stress en dépit de son interférence sur le bien-être de l’individu, fait partie de la vie de tous les jours. L’ignorer, le stress crée le mal-être qui peint l’individu en noir de tristesse et de souffrances infligées au corps. Ressentir du stress n’est pas nécessairement une mauvaise chose en soi, puisqu’il peut contribuer à la motivation. Dans son versant négatif (distress), nombre de personnes sont submergées par des charges qui leur pèsent psychologiquement et physiquement. Du brown-out, l’on peut évoluer vers du burn-out (Baumann F.,2018) avec des traversées d’anxiété et de dépression. C’est une réalité à laquelle sont confrontés les enseignants (Vidal, J.-P. (2006), qui au quotidien, vivent ou subissent des contraintes de travail depuis la conception de supports de cours jusqu’aux examens (partiels pour les étudiants et concours (CAMES) pour les enseignants) en passant par la dispensation de ces cours. Le stress au cours de cette période, participe à l’épuisement des enseignants (Gardner S., 2010). Dans ces conditions, remettre à plus tard (procrastination), ce qu’ils pouvaient immédiatement faire, est généralement la stratégie adoptée par les enseignants pour faire face à leur stress.

2Dans son étude sur « la procrastination académique chez les étudiants. », Gonzalez-Fernandez D. (2016), révèle qu’à plus de 80 %, ce phénomène est observé parmi les universitaires. Un phénomène qui n’épargne pas les étudiants à l’orée des partiels, n’est pas sans conséquences pour les enseignants qui l’observent car en évaluant les étudiants, il s’évalue. C’est au cours de ces moments cruciaux de leur vie que l’on est sidéré de constater des cas d’insomnie (Dagneaux, S., 2021), de surmenages, et parfois des crises d’angoisse (Jeanclaude, C., 2008) et bien d’autres maux afférents à la veille des examens.

3De l’observation du terrain, l’on se pose fondamentalement la question de l’effet que pourrait imprimer le stress dans un rapport susceptible d’exister entre épuisement provoqué par une perte de sens du travail (Brown-out) et l’attitude de toujours reporter à demain ce que l’on pourrait faire dans l’immédiat (procrastination). Plus spécifiquement, l’on cherche à se rendre à l’évidence de l’existence d’un rapport entre les différentes considérations de l’étude.

4Cette étude qui s’inscrit dans une démarche cognitivo- comportementale vise à déterminer la nature réelle du stress et de son influence entre le Brown-out et la procrastination dans leurs rapports. Pour tout ceci, l’on suppose dans un premier temps, qu’il existe un lien entre les variables à l’étude (Brown-out, stress (H1) et dans un second lieu, le niveau du stress module celui de procrastination (H2).

5Pour donner suite aux inquiétudes soulevées, le travail est organisé en dehors de l’introduction et la conclusion, autours des points suivants : la méthodologie, les résultats et la discussion.

Méthodologie

6Elle consiste à décrire les différentes étapes du processus de la démarche pour une meilleure compréhension du phénomène.

Lieu de l’étude

7Pour étudier le rôle du stress entre la perte de sens au travail (Brown-out) par l’individu et son comportement de toujours remettre à plus tard ce qu’il pouvait faire dans l’immédiat (procrastination), l’on a choisi l’Université de Lomé et celle de Kara. Ces deux (02) Universités publique au Togo constituent les lieux de prédilection afin de mieux comprendre et de décrire le phénomène observé.

Type et période d’étude

8L’étude est de type observationnel, transversal et descriptif aux fins de mieux comprendre le phénomène. Elle (étude) a couvert une période de quatre (04) mois (octobre 2024 à janvier 2025) qui correspond à une période d’intense activité au cours de laquelle, les enseignants sont entre les cours et la préparation de concours.

Population d’étude et échantillonnage

9La population cible est les enseignants – chercheurs des deux (02) Universités publiques au Togo. L’échantillon d’étude a été constitué grâce au critère du consentement. Par ce critère, l’échantillon qui se résume à la population d’étude est exhaustif.

10A la suite de cette considération critériée, une population de cent sept (107) enseignants, s’est imposée à cette étude indépendamment des caractéristiques socioprofessionnelles.

Collecte et traitement des données

11Afin de faciliter la collecte de données sur notre population de cent sept (107) agents volontaires, indépendamment de toutes influences extérieures, il est important dans ce cadre d’opter la démarche en sciences humaines (A. Lamoureux, 2006).

12A l’issue des données recueillies, les résultats rendus possibles grâce au traitement de données par le logiciel SPSS, 20.0, a permis de circonscrire la réalité du phénomène dans toute sa forme.

13Pour permettre la collecte d’informations sur le Brown – out, le stress et de la procrastination par les enquêtés, l’évaluation s’est faite à la faveur de l’échelle :

  • de T. E. Brown(2020) sur le Brown-out qui pourrait être un syndrome avant-gardiste d’un épuisement du travail ;

  • sur le Stress perçu de P. Tap et al. (2001), qui permet de déterminer sur une échelle de Lickert (allant de 1 (jamais) à 5 (très souvent)), l’intensité avec laquelle des événements de la vie sont habituellement perçus comme menaçants, ou encore comme imprévisibles, non contrôlables et pénibles ;

  • de P. Steel (2007 ; 2010) sur le Pure de Procrastination. Cette échelle se penche sur les retards dans les prises de décision ; dans la mise en œuvre puis sur le respect des échéances (délais) dans l’exécution des tâches. Le but de cette échelle est de mesurer la tendance à la procrastination en demandant aux répondants de se positionner sur une échelle de type Likert à cinq points, allant de 1 (jamais) à 5 (très souvent).

14Il a été aussi possible à travers ces échelles, de dresser un questionnaire multidimensionnel pratique (sur une échelle de Lickert (1 à 5), accessible aux enquêtés afin de faciliter chez eux, une spontanéité à extérioriser les ressentis patents de leurs réalités intrinsèques.
Aussi les analyses de variances en composantes principales ont été utilisées pour traiter les données collectées.

Considération éthique avec le consentement

15Pour parvenir au bout de l’objectif de l’étude, l’on a sollicité et obtenu l’accord des participants à cette étude. C’est dans le respect de l’éthique et la déontologie de la recherche qu’un consentement éclairé avec les enquêtés est obtenu tout en garantissant leur anonymat.

Résultats

Caractéristiques par catégorie d’enquêtés

16Pour faciliter la lecture, il est important de présenter les effectifs des enquêtés par niveau aux échelles du stress, du Brown-out et de la procrastination.

17Tableau 1: Répartition des effectifs des enseignants par niveau de Brown-out et procrastination suivant le sexe et l’âge en fonction du niveau de stress

NIVEAU

DU STRESS

SEXE

AGES

NIVEAU

BROWN -OUT

PROCRASTINATION

Modéré

Élevé

N

Modéré

Élevé

N

Modéré

Féminin

30-40 ans

01

05

06

00

06

06

40-50 ans

00

07

07

00

07

07

>50 ans

01

04

05

00

05

05

Masculin

30-40 ans

00

02

02

00

02

02

40-50 ans

03

09

12

02

10

12

>50 ans

02

07

09

01

08

09

Élevé

Féminin

30-40 ans

00

02

02

00

02

02

40-50 ans

02

10

12

00

12

12

>50 ans

01

06

07

00

07

07

Masculin

30-40 ans

00

04

04

00

04

04

40-50 ans

03

28

31

01

30

31

>50 ans

02

08

10

00

10

10

TOTAL

15

92

107

04

103

107

Données de l’enquête de janvier à octobre 2024

18A travers l’analyse du tableau1, l’on réalise qu’en majorité, la population d’étude a un niveau de Brown-out et procrastination relativement élevée en fonction du niveau de stress dans l’enseignement. En fonction du niveau de stress vécu, l’on enregistre 92 victimes de Brown-out sur 107 enquêtés et 103 qui ont expérimenté la procrastination au travail. Aussi, indépendamment du sexe, l’on constate des effectifs élevés dans la tranche 40-50 ans puis celle supérieure à 50 ans de victimes de phénomènes observés.

Vérification des hypothèses formulées

19Pour vérifier l’effet du stress dans une interaction parmi d’autres variables, il est préférable d’effectuer des analyses de variances.
Il faut rappeler qu’avant de vérifier l’effet de la variable “stress" dans ses interactions avec d’autres, il a fallu calculer la matrice des corrélations (tableau 2) afin de repérer les variables liées significativement. Il est aussi important pour cette étude, d’effectuer des tests de comparaison de moyennes entre les variables pour mieux concrétiser la divergence constatée entre ces variables.

20Suivant les hypothèses émises, nous supposons que le stress tel que vécu par les enseignants a un effet amplificateur. Les résultats obtenus permettent de vérifier cette exigence et d’accepter ou de rejeter l’hypothèse nulle Ho (absence de liens entre le stress et les autres variables que sont, le Brown-out et la procrastination)

  • Matrice de corrélations entre différentes variables et dimensions

21Avant toute analyse, il faut déterminer les corrélations entre les différentes échelles de l’étude.

22Tableau 2 : Corrélation entre les échelles de Brown T. E. (2020) sur le Brown-out ; de Tap P. et al. (2001)sur le Stress perçu (échelle Toulousaine de stress) et celle de Steel, P. (2007 ; 2010)de pure procrastination

VARIABLES

BROWN-OUT

STRESS

PROCRASTINATION

Brown-out

1

,134**

,137**

Stress

1

,547**

Procrastination

1

Données de l’enquête de janvier à octobre 2024

** La corrélation est significative au niveau 0.01 (bilatéral).

23De l’analyse du tableau 2, il ressort l’existence d’un lien entre les différents instruments de l’étude. Ce qui exclut l’hypothèse nulle Ho (absence de liens entre le stress et les autres variables que sont, le Brown-out et la procrastination).

24Tableau 3 : Analyse en composantes principales par la méthode d'extraction

VARIABLES

VALEURS

PROPRES INITIALES

EXTRACTION SOMMES DES CARRES DES FACTEURS RETENUS

Total

% de la variance totale expliquée

% cumulés

Total

% de la variance

%

Cumulés

Brown-out

1,43

54,64

54,64

1,43

54,64

54,64

Stress

0,70

30,55

85,19

Procrastination

0,21

14,81

100,00

Données de l’enquête de janvier à octobre 2024

25L’on constate à travers le tableau qu’il existe un lien entre les différents instruments qui se démarquent du point de vue de leur coefficient : la corrélation entre le Brown-out et Procrastination est r = 0,137 (p < 0,001) avec 54,64% de variance totale expliquée alors qu’elle est de r = 0,546 (p < 0,001) avec 30,55% de variance totale expliquée pour le stress et la Procrastination (tableaux 3 ; 4). Cette différence est significative au seuil p < 0,001. Il semble alors exister un lien entre le stress et la Procrastination à une proportion plus élevée que celui liant le Brown-out aux autres variables. Il en est de même pour les liens entre les différentes dimensions ou sous-échelles qui diffèrent quant à la valeur de r calculée et de leur seuil p obtenu.

  • Plus les enseignants vivent du stress lié à l’épuisement en particulier celui impliquant le Brown-out, plus ils procrastinent (Hypothèse ou supposition émise plus haut).

26Tableau 4 : Analyse de variance des résultats de la procrastination des enseignants suivant l’épuisement en particulier celui impliquant le Brown-out en fonction du niveau du stress atteint.

NIVEAU OBSERVE DE

N

MOYENNE

ECART-TYPE

INTERVALLE DE CONFIANCE A 95% POUR LA MOYENNE

Borne inférieure

Borne supérieure

BROWN-OUT

Modéré

ddl= 105;

t =-3,73; p= 0,000

Stress modéré

18

69,29

29,28

-18,44

-5,54

Stress élevé

23

81,53

30,18

Elevé

ddl= 105;

t =-1,66; p< 0,09

Stress modéré

21

59,11

25,69

-9,66

0,62

Stress élevé

45

63,63

24,47

PROCRASTINATION

Modéré

ddl = 105;

t =-7,211; p=0,000

Stress modéré

11

51,54

24,47

0,06

9,15

Stress élevé

30

46,92

19,48

Elevé

ddl= 105;

t =-,002; p< 0,05

Stress modéré

07

1,41

0,42

-0,20

-0,11

Stress élevé

59

1,73

0,04

Données de l’enquête de janvier à octobre 2024

27A travers l’analyse du tableau, le stress des enseignants n’est pas forcément dû au Brown-out du niveau élevé, car la différence est non significative (ddl = 105 ; t =-1,657; p< 0,09). Par contre celui modéré induit significativement leur stress.

28Les enseignants sont plus stressés lorsqu’ils subissent un Brown-out du niveau modéré plutôt que celui du niveau élevé, dans un intervalle de confiance de [-18,44 ; -5,54] à 95% de la moyenne totale(Brown-out du niveau modéré : Moy.stressés = 81,53 >Moy stressés modéré = 69,29 ; avec des écarts-types respectivement δ=30,18 et δ=29,28 au seuil p= 0,000).

29Cependant il faut relever que plus les enseignants vivent le stress au travail plus ils adoptent la procrastination (hypothèse vérifiée), l’on constate avec les données du tableau 4 qu’il existe, un lien entre le stress et le comportement procrastinant adopté par les enseignants indifféremment du niveau (différence significative aux p=0,05 et P=O,001). Néanmoins en tenant compte du niveau de stress atteint, il existe une différence significative entre les enseignants en situation de procrastination. En fonction de leur niveau de stress (pour les stressés), les scores moyens sont proportionnels aux seuils d’affection aux différentes procrastinations observées dans ce tableau (Moy.procrast élevé /stress élevé. (1,73) < Moy.procrast modéré / stress élevé. (46,92), aux seuils (p=0,05 ; p=0,000 et Moy.procrast élevé / stress modéré. (1,41) < Moy.procrast modéré / stress modéré. (51,54), aux mêmes seuils).

Discussion

30L’intérêt porté sur l’effet du stress dans une relation entre les variables comportementales des enquêtés, interpellent à juste titre, les acteurs du monde universitaire.
Le milieu de travail de l’enseignant a cessé d’être un environnement d’épanouissement, d’éclosion du savoir pour cultiver la coercition, où l’enseignant ne fait plus son travail par vocation mais par contrainte (Torres J-C. 2014). La contrainte naît du moment où l’enseignant est obligé de faire vite un travail qui lui garantit sa pitance afin de se préoccuper de celui qu’il s’imaginer des conditions favorables à son épanouissement.

31En raison une perte de sens de son travail, la victime (enseignant) développe une attitude qui naturellement se démarque de ses attentes initiales. C’est le point de départ d’un désire, celui de différer ou de mettre à plus tard ce qu’on pourrait faire dans l’immédiat bref à procrastiner.

32Pour cerner le dessous de tous les comportements des victimes, il faut davantage pousser la curiosité sur le stress dans son expression vers la procrastination. Des résultats de l’étude, il faut relever que le niveau du stress des enquêtés né d’une perte de sens du travail (Brown-out) est plus élevé que modéré dans un intervalle de confiance à 95% de la moyenne totale (tableau 4). Par contre à un niveau élevé du Brown-out, le stress constaté serait l’apanage de facteurs non maîtrisés ou non encore élucidés dans cette étude. Alors l’on peut s’autoriser sans conclure que le stress des enquêtés est né au cours de la phase modérée au Brown-out (Isnard Bagnis, C.(2017). Cependant, il importe de nuancer les résultats de l’enquête car la moyenne à elle seule ne garantit pas la présence du phénomène vécu.

33Les résultats de cette étude rendent compte d’une dissimilarité dans la pensée qui crée un désordre dans lequel, le stress s’inscrit plus dans une dimension cognitive que temporel, ce qui infirme les résultats de la recherche de C. Jeannerat (2019) sur la perception du stress scolaire. Toutefois, il apparait que le stress vécu se traduit par des difficultés d’organisation du travail dans le temps dû au sens porté au travail.

34Pour tout résumer, les enquêtés qui ont perdu le sens du travail (Brown-out élevé) manifestent du stress indifféremment du niveau (DNS au seuil p<0.05). Dans cette relation doigtée, que dire des épuisés de type Brown-out (modéré) qui procrastinent puisque la corrélation au test t de student est significative (t =-3,73; p= 0,000) entre le Brown-out et le stress qui explique à 30,55% de la variance totale la présence de la procrastination chez les enquêtés. En cherchant à savoir si tous les enquêtés ont une pensée procrastinatrice ? L’on se permet de dire, grâce aux résultats obtenus, que la procrastination de façon générale est observée à tous les niveaux. Cependant une nuance mérite d’être apportée : c’est l’état du stress qui la module, ce qui confirme les résultats de Tice, D. M., et Baumeister, R. F. (1997) dans une étude longitudinale sur la procrastination, performance, stress, et le bien être des individus.

35Il faut se dire que le degré de procrastination (modérée) est proportionnel à celui du stress indépendamment du sexe.
L’environnement universitaire en dehors de son rôle éducateur, est un incubateur avéré de comportements procrastinateurs à s’en tenir au travail de Berger J., (2021) sur l’autorégulation motivationnelle et procrastination.

36Avec la réalité du terrain (concevoir le cours, corriger les copies, écrire les articles, etc.), perçus comme une routine qui n’a de sens à leur vie, est source de compromission au bien-être des enseignants (Lantheaume, F. et Hélou, C., 2008), ce qui explique leur niveau de stress. Tout ceci contribue à rendre plus fragiles les enseignants en adoptant la procrastination comme un mécanisme d’adaptation, ce qui est en accord avec les résultats obtenus par Mallika G. et Kalita S. (2025). Les résultats de leur étude révèlent qu’il existe une corrélation négative mais significative entre la procrastination et la réussite scolaire, ce qui indique qu'une augmentation de la procrastination entraîne une baisse de la réussite scolaire, et inversement. Cependant, dans une autre étude sur la « Procrastination et réussite des apprentissages en FOAD », Frayssinhes J. (2018) présente une perception différente. A l’issu de l’analyse des résultats de son étude, il parvient à relever que :

« les enseignants ne sont pas de « grands » procrastinateurs pour l’écrasante majorité d’entre eux (les 4/ 5), ainsi que les ingénieurs à 92,3%. Nous formulons l’hypothèse que ces deux professions ont une obligation de résultats avec des rendus à date programmée longtemps à l’avance ce qui demande un système organisationnel duquel la procrastination est bannie » Frayssinhes J. (2018, p.4)

37Les résultats des auteurs sont mitigés sur cette problématique de la procrastination en milieu éducatif
Il ne faut pas perdre de vue du rôle que pourrait jouer la personnalité des enseignants, un aspect qui n’a pas été pris en compte (une des limites de l’étude) dans cette analyse. Il faut se dire que le rôle joué par la personnalité, pourrait être déterminant dans la capacité à faire face à des situations au-delà d’un seuil de tolérance, ce qui les rend plus vulnérable à la procrastination.

38Il se dégage de l’étude que les relations entre les variables à l’étude (Brown-out, stress et procrastination) sont significatives au niveau 0.01 (bilatéral). Par lien de conséquence, nos hypothèses sont confirmées: il existe une corrélation entre le Brown-out, stress et la procrastination, les variables à l’étude (H1). Il est aussi observé que le niveau du stress module celui de procrastination (H2). Nous ne pouvons pas dans la dynamique de cette étude, dire davantage sur le degré d’influence de ces relations.

39Cette étude, mérite un intérêt particulier dans la détermination des facteurs à l’origine du phénomène de procrastination et de ses facteurs associés (types de personnalité par exemple) favorables à leur émergence car ils engagent la vie de l’enseignant au même titre que celle de l’apprenant.

40En dépit de toute chose, ce travail présente une limite liée à la taille et à la restriction aux seuls faits d’enseignant, elle aurait pu prendre en compte dans une logique de collaboration au travail, tous les acteurs du monde universitaire. Le phénomène du stress et de ses corollaires (la procrastination, Brown-out) n’est pas unilatéral, orienté seulement sur les enseignants mais pourrait avoir des ramifications et des sources venant d’ailleurs, des apprenants par exemple (Gonzalez-Fernandez, D., 2016) pour agrémenter le comportement de l’enseignant dans son travail. Il faut mentionner que nos instruments se limitaient à collecter des informations sur des variables de façon spécifique sans en établir de relations entre ces variables. Pour cette raison, il est difficile d’établir de liens de causalité sans des techniques statistiques qui peinent à déterminer sans l’ombre d’aucun doute, le niveau du mal ressenti par les victimes.

Conclusion

41Ce travail d’éveil de conscience sur certains comportements soupçonnés en des personnes qui les observent et qui impactent leur quotidien, leur carrière voire leur bien - être (Tice, D. M., & Baumeister, R. F. (1997), permet de repenser l’adaptation des conditions de travail aux travailleurs. Les résultats de l’étude révèlent des signes alarmants de procrastination en lien à l’état ou niveau du stress vécu par les victimes suite au sens accordé à leur travail. Par conséquent, une part importante d’enseignants emportée par le phénomène (procrastination), affichent un stress d’un niveau comminatoire. D’un autre point de vue, bien que les résultats ne soient pas clairs sur les différents degrés en termes de grade universitaire, ils mentionnent dans une perspective holistique, la présence dans l’environnement universitaire, d’un stress d’un niveau élevé des enseignants.

42Ce phénomène récurrent qui a été renseigné tout au long de ce travail touche une frange non négligeable d’enseignants – chercheurs.
Le stress reste et demeure un sujet central dans le concert des difficultés auxquelles font face les enseignant-chercheurs. C’est une problématique d’actualité en raison de multiples conséquences (néfastes) que le stress cause à l’individu. Ce qui nécessite une préoccupation particulière et de moyens nécessaires afin de se prémunir contre le stress au travail. En contribuant à la mise en œuvre de stratégies pour faire face, l’on contribue au mieux-être d’une façon générale.

43L’analyse des variables de l’étude et de leurs relations multiples montrent qu’ils constituent des facteurs indéniables de comportements procrastinés qui pèsent sur la conscience des enquêtés dans leur travail. Il serait souhaitable pour la meilleure compréhension de la procrastination, phénomène peu compris dans un périmètre restreint de l’environnement universitaire, une étude d’envergure plus étendue soit menée dans le but d’identifier d’autres facteurs en ligne de mire à toujours remettre toute chose à plus tard (procrastination).

44Nous parlons bien de la remise à demain ce que l’on peut faire dans l’immédiat qui est un comportement susceptible d’entraver l’enseignant dans sa carrière et par lien de conséquences, la qualité de l’enseignement et celui des apprenants à leur sortie. Le fait d’accumuler les besoins à plus tard, certains par le manque de temps, deviendront désuètes dans le temps. Tout ceci explique le bâclage des cours par les enseignants qui pris par le temps, sont dans l’impossibilité de mener les apprenants à bien cerner le cours donc, hachent ou s’en passent de certains paragraphes qui auraient pu faciliter la compréhension.

45L’une des conséquences les plus vécues par ce phénomène est la baisse du niveau des apprenants.
Ceci nous autorise, sans fermer la page à ce travail sur la procrastination, d’orienter de nouvelles pistes axées plus sur les déterminants personnels qu’à d’autres caractéristiques individuelles. C’est aussi d’envisager à travers cette étude, des pistes dynamiques d’une ergonomie-adaptative au travail.

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Bibliographie

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Pour citer ce document

Amaèti SIMLIWA PITALA et Ibn Habib BAWA, «Du Brown-out à la procrastination au travail : effet du Stress chez les enseignants des universités publiques du Togo », Mu Kara Sani [En ligne], Dossier, 41 ‖ juin 2025, mis � jour le : 21/07/2025, URL : https://revue-irsh.org:443/mukarasani/index.php?id=685.

Quelques mots à propos de :  Amaèti SIMLIWA PITALA

Université de Kara , LaRELIPS

simlmichel@yahoo.fr

Quelques mots à propos de :  Ibn Habib BAWA

Université de Lomé, EQ-POD

ihbawa@yahoo.com